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Une 78e édition du Festival d’Avignon atypique et ouverte à d’autres voix

A année particulière, festival particulier. En Avignon, 2024 restera comme une année étrange, « atypique », comme l’a dit lui-même Tiago Rodrigues, le directeur du Festival, lors d’une rencontre avec le public, le 15 juillet. La 78e édition de la manifestation fondée par Jean Vilar avait déjà dû avancer son calendrier d’une semaine, en commençant le 29 juin, avant les vacances scolaires, pour ne pas se chevaucher avec les Jeux olympiques et la mobilisation, notamment sécuritaire, qu’ils exigent.
Puis il y a eu l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale, le 9 juin, et la tenue des élections législatives, le 30 juin et le 7 juillet, en plein festival, avec la perspective de l’arrivée du Rassemblement national au pouvoir. Jusqu’au soir du second tour, une large partie du public et des professionnels est restée tétanisée par cette perspective. Pour Avignon, l’accès du Rassemblement national aux commandes aurait eu des conséquences directes : Tiago Rodrigues avait annoncé, dès le 16 juin, dans nos colonnes, qu’il « n’acceptera[it] jamais de travailler avec l’extrême droite » et qu’il défendrait un « festival qui ne collabore pas ». Ce qui aurait impliqué un festival à voilure considérablement réduite, privé des financements de l’Etat.
Ce contexte a fait peser de lourdes inquiétudes sur la fréquentation des spectacles, mais le public a été largement au rendez-vous : le taux de remplissage devrait s’établir autour de 90 % (pour une jauge d’un peu plus de 121 000 billets mis en vente), actant que le « in » a nettement mieux résisté que le « off », dont la fréquentation a manifestement souffert.
Sur le plan artistique, cette édition est apparue comme moins riche, excitante, originale, que l’édition inaugurale de Tiago Rodrigues en 2023. Le festival a pourtant offert quelques grands spectacles, à commencer par la création d’ouverture donnée à La FabricA : Absalon, Absalon ! a fait passer Séverine Chavrier dans la dimension des maîtres de la mise en scène, avec une forme de théâtre total, porté par une réflexion puissante sur l’Amérique et le métissage, en lisant Faulkner à la lumière d’Edouard Glissant.
Avec le deuxième spectacle d’ouverture, Dämon, présenté dans la Cour d’honneur du Palais des papes, la performeuse et metteuse en scène Angélica Liddell a, comme à son habitude, divisé le public et la critique. Cette distance prise par une partie de la critique à l’égard de son travail, l’artiste espagnole l’a d’ailleurs mise en scène dans sa pièce, s’en prenant directement à certains journalistes – dont nous sommes – sous forme d’insultes ou de gestes grossiers.
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